Page:Rodenbach - Le Carillonneur, Charpentier, 1897.djvu/61

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

VI


Borluut, quand il montait dans la tour, ne se contentait pas d’y rester le temps nécessaire, l’heure prescrite de carillon. Il s’y attardait volontiers en une lente flânerie. Il découvrit ainsi de nouvelles cloches, les plus grandes, qu’il n’avait pas inspectées lors de ses premières ascensions. D’abord le bourdon, qui était suspendu dans la partie supérieure du beffroi, urne immense, d’une antiquité vénérable, fondue en 1680 par Melchior de Haze et signée de son nom. On en regardait l’intérieur comme un abîme. On avait la sensation d’être au bord d’une falaise qui plonge à pic dans la mer. Il semblait qu’on y aurait noyé un troupeau. Le regard n’en apercevait pas le fond.

Le carillonneur découvrit une autre cloche, vaste aussi, mais qui n’était plus fruste et nue. Le métal en était tout historié ; des bas-reliefs couvraient la robe de bronze comme d’une dentelle verdâtre. Certes, le moule de fonte de celle-ci avait dû être com-