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Maintenant, c’étaient pour lui des réalisations immédiates, un plaisir personnel et continu. Au milieu de cette Bruges morose, dans sa destinée de veuf sans incidents où toutes les journées étaient de la même couleur et grises comme l’air de la ville, quel changement soudain que cette vie désormais à l’affût, toujours aux aguets de quelque trouvaille ! Et les bonnes fortunes du collectionneur ! La rencontre imprévue qui va augmenter son trésor ! Van Hulle y apportait déjà une compétence. Il avait étudié, cherché, comparé. Il jugeait, à première vue, de l’époque des horloges. Il diagnostiquait l’âge, triait les authentiques de celles qui sont contrefaites, appréciait la beauté du style, connaissait certaines signatures, les illustrant comme des œuvres d’art. Il posséda bientôt toute une série d’horloges et de pendules variées, rassemblées insensiblement.

Il avait voyagé, pour s’approvisionner, dans des villes voisines. Il suivait les ventes de mobiliers où, parfois, à des mortuaires, on en trouvait de rares, de curieuses, existant immémorialement dans de vieilles familles. Sa collection devint importante. Il en eut de tous genres : des pendules Empire, marbre et bronze, ou bronze doré ; des pendules Louis XV et Louis XVI, aux panneaux chantournés, en bois de rose, avec des incrustations, des marqueteries, des scènes galantes qui en faisaient les boiseries mièvres comme un éventail ; des pendules mythologiques, idylliques, guerrières ; des pendules de biscuit, de