même toit, comme un couple qui s’est conquis. Il est vrai qu’ils étaient contrariés par la présence de Barbe, mais leurs âmes se parlaient, dans cette union spirituelle qui n’allait qu’à se consoler l’un l’autre et à regretter à deux. Leurs yeux aussi se rencontraient, se touchaient. Ah ! cette caresse des yeux sur les yeux, qui ressemble à celle des lèvres sur les lèvres, et qui est déjà de la volupté !
Quelque chose de charnel naquit entre eux.
Car, à vivre ensemble, ils se dévoilaient sans cesse l’un à l’autre un peu de leur intimité. Godelieve, si foncièrement chaste, ne songeait pas au péril de se montrer en négligé, dans la simplicité d’une robe d’intérieur. Mais, en cette toilette sommaire, elle transparaissait. Joris la voyait mieux au-delà des plis rares, de l’étoffe plus docile. Il y avait moins de voiles entre eux. Parfois aussi ses cheveux, mal coiffés le matin, suggéraient le désordre où sont les cheveux dans l’amour. Ainsi peu à peu Godelieve devenait pour lui comme la femme qu’on a possédée et qui n’a plus rien de secret. C’était le résultat de la vie commune où chaque jour on se divulgue un peu plus.
Joris se rendit compte de l’évolution rapide : d’abord, quand il se sut toujours aimé par Godelieve, il éprouva une affection infiniment reconnaissante pour sa douceur, sa bonne garde autour de lui ; puis ce fut le regret amer du bonheur manqué, l’envie grandissante de réparer la double erreur. Leur