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les carillonneurs de Malines, d’Audenarde, d’Herenthals, étaient inscrits ; d’autres encore, qui peut-être se récuseraient ; sans compter l’imprévu, car on avait le droit de se faire inscrire jusqu’à la dernière minute.

Après la publication, du haut de la fenêtre à balcon, le bourdon sonna précipitamment trois coups, comme trois coups d’angelus. C’était l’annonce de l’entrée en lice d’un concurrent.

Aussitôt, en effet, le carillon s’ébranla, un peu confusément. Ce n’était plus le jeu automatique de tantôt. On sentait maintenant un jeu libre et capricieux, l’intervention d’un homme qui réveille les cloches une à une, les bouscule, les gourmande, les caresse, les conduit devant lui en troupeau. Le départ n’était point maladroit, mais une débandade suivit, une cloche eut l’air de tomber, d’autres s’enfuirent ou se refusèrent.

Un second morceau fut mieux exécuté, mais le choix en était malheureux : c’était un pot-pourri, des airs quelconques cousus ensemble, habit d’arlequin, musique qui avait l’air de faire du trapèze au haut de la tour.

Le peuple n’y comprit rien et resta froid. De rares applaudissements éclatèrent, quand il cessa, firent une minute leur bruit de battoirs au bord de l’eau.

De nouveau, après un intervalle, le bourdon sonna ses trois coups d’angélus. Le second concurrent s’en-