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VILLIERS DE L’ISLE-ADAM




Villiers fut un inventeur et, comme tel, subit le sort de tous les inventeurs. Sa destinée aussi fut d’abord d’étonner. La foule se méfie des inventeurs. Son premier mouvement est de ne pas croire, d’imaginer une mystification, de s’irriter qu’on la dérange dans ses habitudes d’œil et de pensée. Sa méfiance, il est vrai, est souvent justifiée ; il y a tant de faux inventeurs qui promènent leur trouvaille comme s’ils portaient le tonnerre quand ce n’est qu’une fusée. Il n’est pas de carrières où il y ait autant de mirages. C’est parmi les inventeurs qu’on trouve le plus de ratés. Parmi les inventeurs littéraires aussi. La foule n’a donc pas tout à fait tort. Mais elle se trompe souvent, ne reconnaît pas tout de suite les imposteurs des vrais apporteurs de neuf, et cela en toutes matières. Les pauvres inventeurs ! Il y a un cas topique en ce siècle, tout à fait dans le goût de Villiers, et qui l’aurait réjoui, s’il avait vu en ce moment l’inouï triomphe de la bicyclette et songé en même temps à ce