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cette merveilleuse renaissance de l’art industriel en Angleterre, à laquelle collaborèrent Rosetti, Morris, Crane, tant d’inventifs et précieux artistes. Mallarmé y devait songer pour la France. Naguère il fonda et rédigea seul un journal qui s’appelait La Dernière Mode, où étaient promulgués les lois et vrais principes de la vie tout esthétique, avec l’entente des moindres détails : toilettes, bijoux, mobiliers, et jusqu’aux spectacles et menus de dîners. La poésie aussi, il rêverait de la faire entrer dans la vie, qu’elle s’inscrivît aux murs des appartements, aux vaisselles, aux bibelots ; il lui arriva d’en orner des éventails, l’éventail qu’il a si magnifiquement dénommé « l’unanime pli »

Dont le coup prisonnier recule
L’horizon délicatement.

Dans ces vers de grâce suprême, nous retrouvons (toujours pour expliquer l’œuvre par les milieux et les éléments extérieurs, selon la théorie de Taine) l’esprit très ataviquement et foncièrement français de Mallarmé. Hérédité de longue date, car ces lointains ascendants étaient ici de hauts fonctionnaires, et quelques-uns avaient déjà commerce avec le livre, tel celui qui fut syndic des libraires sous Louis XVI et dont le nom se retrouve au bas du privilège du Roi, dans cette édition originelle du Vathek