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Parfois le sens s’enchevêtre, s’assombrit. Une série de vocables rares, d’une lumière inquiétante et trouble, jonchée de pierreries uniques dont la signification n’est pas donnée, pour laisser rêvera quelque collier désenfilé de morte ou à quelque couronne, victime d’un rapt ancien, dont l’or s’est évaporé pour des crimes…


Mais n’importe ! Est-ce que le diamant n’a pas aussi des feux seulement intermittents : goutte de lumière, bue à chaque instant ; clarté tournante d’un petit phare dans la nuit ; étoile qui clignotte…

Et les poèmes de Mallarmé sont aussi des énigmes de couleur, ce dont la légitimité se prouve, dit-il lui-même, par ce fait que « en écrivant, on met du noir sur du blanc », comme le mystère sur l’évidence.

Quelques-unes des causes qui font ces admirables poèmes un peu rétractés et hermétiques, c’est, par exemple, la suppression fréquente de l’article, de la ponctuation, de toute conjonction. La syntaxe aussi est retorse, renversée, s’influence de la construction anglaise.

Car — nous le voyons de plus en plus — Mallarmé doit beaucoup à l’Angleterre : son goût du rêve, de l’au delà, son esthétisme, sa syntaxe enfin, sans compter son désir d’introduire partout l’art dans la vie qui provient de