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fleurs classées, de minéraux, d’arcs-en-ciel en fusion, tant soudain un ton est violent comme un poison, un autre lotionne délicieusement l’œil. Recherches incessantes ! Trouvailles merveilleuses ! D’autres, comme M. Claude Monet, M. Pissarro, ont simplement tâché à peindre la lumière, toutes les décompositions du prisme, les étapes quotidiennes de l’air. M. Besnard a voulu fixer des tonalités plus compliquées. En cerveau scientifique qu’il est, il a fait des expériences. Il a rêvé des mélanges : c’est-à-dire la combinaison de l’artificiel avec le naturel, d’où ces figures éclairées par le gaz ou des lampes, en même temps que par la lumière du jour. Et rien n’est aussi étrange et troublant. Imaginez des cierges brûlant au soleil… Tristesse plus intense de leurs clartés, réconciliées sur le poêle d’un convoi de vierge ! M. Besnard a ainsi inventé des éclairages. Il a trouvé des désaccords de tons qui sont à la peinture ce que les dissonances de Wagner sont à la musique.

D’autre part, il voulut également fixer des tonalités plus exceptionnelles : au lieu des seules phases diurnes ou crépusculaires, il y a aussi, dans la Nature, les aspects de trouble, des nuances momentanées, des minutes chimiques, pourrait-on dire, des accidents de la lumière : par exemple, le soufre d’un éclair, la lividité de l’éclipse, les phosphorescences de la mer et de