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infaillible mêlée à une indéfinissable poésie qui assigne à ses œuvres une beauté d’absolu en même temps qu’un charme de suggestion.

Il sait tout de son métier, et il a tout inventé de son art. C’est-à-dire qu’il a ressuscité dans notre siècle la peinture décorative. Il a trouvé pour elle un nouveau style, une coloration nouvelle. Son génie a été de comprendre qu’il fallait aux édifices modernes des fresques qui leur fussent appropriées. Il a créé une peinture conforme pour les architectures actuelles, pour les monuments de France, construits en pierre de France, cette pierre un peu grisâtre, un peu jaunâtre, en tous cas pâle et mate. Donc il n’a voulu qu’une peinture mate aussi, se servant pour y arriver, de toiles spécialement préparées, de couleurs en demi-teintes et en nuances, avec des mauves, des roses doux, des jaunes qui s’acidulent à peine, des bleus qui ne chantent qu’en sourdine. Ainsi, au Panthéon, les autres peintures trouent les murs ; la sienne s’accorde à leur tonalité neutre, s’identifie avec eux. On dirait vraiment le rêve que les pierres font.

Et quel rêve ! Celui d’une humanité supérieure, l’humanité telle qu’elle aurait dû être, ou telle qu’elle sera. Humanité mystique et mythique, qui ne va jamais jusqu’à être mythologique. Ses femmes ne sont pas des déesses ; ce