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PUVIS DE CHAVANNES




Un maître admirable, d’une personnalité décisive, d’une inlassable fécondité. Naguère, lorsque beaucoup méconnaissaient encore son art souverain, Gautier, souvent clairvoyant, écrivait : « Dans un temps de prose et de réalisme, il est naturellement héroïque, épique et monumental. » Pour ses vastes compositions, il peint d’abord une petite esquisse qui est l’exposé de son idée, pour ainsi dire la réduction de l’œuvre, déjà totale en lui. Puis il l’exécute dans les proportions d’un grand tableau de chevalet. Une minutie inexorable de dessin : sans cesse l’artiste calcule, compare, mesure, trace avec la règle ou le fusain des angles visuels. On dirait d’un ingénieur, d’un géomètre qui arpente de l’œil le modèle et la toile. Quand ce travail est définitif, il agrandit le tableau tout simplement au carreau, comme font les praticiens dans le marbre pour la maquette des statuaires. De là son dessin qui a un air géométrique. Or c’est précisément cette précision