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terminé un triptyque comme ceux que peignaient les peintres de sa race — il est originaire de Bréda — ces maîtres hollandais et flamands dont il a l’imagination fiévreuse, le coloris massif et violent.

On songe surtout devant ces trois livres au triptyque de Quentin Metzys qui est au Musée d’Anvers, un des chefs-d’œuvre de tous les siècles et de toutes les écoles.

Dans le volet de gauche, Hérodiade est assise à côté du Tétrarque à la table du festin où, parmi les roses, les cristaux, les argenteries, songe le chef décapité de Jean-Baptiste que la favorite taquine du bout de son couteau d’or comme un fruit de plus parmi les autres fruits du dessert. Salomé vient de danser. L’odeur du sang se mêle à l’odeur du sexe. Volupté, cruauté, complication des vieillesses de l’âge et des vieillesses du temps, raffinement des décadences. Ce volet-là c’est À Rebours.

Dans le volet de droite un bûcher mauvais s’allume. Des hommes aux visages déformés, aux yeux de concupiscence, y jettent des sortilèges et des maléfices, cherchent dans les flammes des formes qui s’enlacent, se pâment, défaillent. Le feu a l’air de sortir par un soupirail de l’Enfer soudain ouvert. Ce volet-là c’est Là-Bas.

Et voici le panneau central : la figure lamentablement douloureuse, mais tendre, de Jésus,