Page:Rodenbach - Bruges-la-Morte, Flammarion.djvu/211

Cette page a été validée par deux contributeurs.

volées, qu’on entendît des ailes invisibles, un passage d’anges.

Et tout cela avait l’air d’aboutir à son âme, son âme où elle sentait la présence de Jésus, où l’hostie, qu’elle avait incorporée à la messe de l’aube, rayonnait, encore entière, dans son plein orbe au centre duquel elle voyait un visage.

La vieille servante, resongeant à la bonté de Jésus qui était vraiment en elle, se signa, recommença à prier, ayant le ressouvenir et comme le goût à la bouche des Saintes Espèces.

Cependant son maître l’avait sonnée ; c’était l’heure de son déjeuner. Il en profita pour lui annoncer qu’il attendait quelqu’un à dîner et qu’elle s’arrangeât en conséquence.

Barbe fut stupéfaite ; jamais il n’avait reçu personne ! Cela lui parut étrange ; tout à coup une pensée affreuse lui traverse l’esprit : si ce qu’elle avait craint autrefois, ce à quoi elle ne songe plus, un peu tranquillisée, allait arriver ? Elle