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regimbant, s’attristant à l’idée de voir Hans un peu enlaidi à cause de la tête toute rase. Moissonner sa belle chevelure ! Faucher les épis couleur de soleil ! Elle apercevait déjà le petit crâne tout nu comme un champ d’éteules ; les cheveux drus et courts comme un gazon qui ne peut pas pousser… Pourtant elle finit par céder, mais du moins elle ne laisserait pas dilapider le cher trésor ; elle voulut accompagner Hans. Douleur de voir se rétrécir à mesure l’abondante chevelure, la tête se dégarnir comme un agneau pendant la tonte ! Mais est-ce qu’on abandonne au hasard la laine de l’agneau ? Mme Cadzand, tout émue dans le sombre salon du coiffeur, se pencha, se baissa, recueillit les soyeuses boucles. Hans souriait, assis devant la glace, son visage s’affinant maintenant en maigreur ascétique, en sveltesse de pâle ivoire taillé. Il n’était pas moins beau, il était autre.

Mme Cadzand suivait avec angoisse la métamorphose : tête maintenant simplifiée, comme s’il avait été ma-