Page:Rod - L’Innocente, 1897.djvu/92

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Cela, non plus, n’était pas pour moi ; pourtant j’y pensais sans cesse.


La réclusion de la comtesse, cependant, ne pouvait durer indéfiniment. Elle sortit, au bras de son père : on la vit traverser la ville avec des allures hésitantes de convalescente.

Les rues des Pleiges sont habituellement désertes ; néanmoins, on a peu de chance de les suivre dans toute leur longueur sans rencontrer quelque dame faisant des emplettes de ménage ou quelque notable allant au cercle, d’un pas grave. La comtesse Micheline fit donc plusieurs rencontres. Sans doute, elle s’attendait à des saluts respectueux, à de sympathiques questions sur sa santé ou sur celle de son fils. Il ne se passa rien de semblable. Me Féréday s’arrêta devant une boutique en tournant le dos, pour éviter de saluer ; et M. Marian dit à sa fille :

— Il nous en veut de lui avoir retiré la gestion de nos affaires. S’il savait pourquoi, le brave homme…

Mme d’Ormoise passa sur l’autre trottoir sans regarder, et la comtesse dit à son père :

— Elle ne nous a pas vus.

J’imagine qu’elle fut un peu peinée de rentrer dans sa solitude sans avoir échangé une parole avec personne. Elle