Je baissai la tête, l’air penaud. Mais, au fond, j’étais fier d’avoir souffert pour elle, et de ne pas le lui dire, et d’être grondé ; et je pensais :
« Va, va, ma bonne marraine, vous avez beau dire, je recommencerai demain, après-demain, les autres jours, toutes les fois qu’il faudra vous défendre ! »
Elle, cependant, songeant sans doute qu’il ne fallait rien ajouter au chagrin de ma défaite, me prit sur ses genoux pour embrasser mon œil blessé ; et je ne fus plus seulement fier, je fus heureux. Et ce jour-là j’osai lui dire :
— Oh ! ma marraine, je vous aime de tout mon cœur !
Ma marraine ne s’occupait pas bien longtemps de moi : elle appelait son fils et, tout inquiète, le livrait à mon père qui l’interrogeait, l’auscultait, le palpait longuement. Elle demandait, en le rhabillant :
— Eh bien, docteur ?
Mon père la rassurait.
— Faites-le jouer, disait-il. Je vous laisse Philippe jusqu’à ce soir. Qu’ils courent ensemble, qu’ils s’amusent : c’est le meilleur remède.
Il partait. Ma marraine nous disait :
— Allez jouer !
Alors, nous jouions, sans entrain, par devoir. Cet enfant frêle, beaucoup plus grand que moi, bien que nous eussions le