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connus, des étrangers, des oiseaux de proie qu’il eût mille fois mieux valu ne pas attirer sur la ville, où ils ne manqueraient pas d’exercer leurs ravages habituels ? Mais la comtesse et M. Marian ne prenaient conseil de personne, pas même de Mlle Éléonore ; celle-ci, qui brûlait de savoir ce qu’on ne lui apprenait pas, courait de maison en maison, en quête de renseignements ou d’hypothèses ; et, pour marquer sans doute qu’il ne fallait point la confondre avec les autres habitants du château, elle répétait à tout venant :

— Ma nièce n’a point de confiance en moi !

On la plaignait, on la consolait, on insinuait :

— Probablement qu’ils ont de bonnes raisons pour cacher leurs actes.

Alors, elle se mettait à gémir :

— Je ne sais pas ce qui se passe, ma chère amie, mais je suis bien inquiète !

Et c’étaient des :

— Si le comte Anthony voyait cela !

Ou bien :

— Si la vieille comtesse revenait de l’autre monde !

Après lesquels on concluait :

— Cette pauvre Mlle Éléonore est bien à plaindre !

Presque seul, mon père continuait à fréquenter le château où, d’ailleurs, la santé précaire du petit Anthony nécessi-