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ritable. Alors le désespoir l’envahit : il eut la vision de l’existence de douleur et de honte qui l’attendait ; la mort l’attira, tentation dernière qui appelle les désespérés et les vaincus : de même qu’il avait perdu son honneur, il perdit encore son âme…

L’histoire, tu le vois, était complète. Elle ne manquait ni de pittoresque ni de vraisemblance. Elle « se tenait », comme vous dites, vous autres gens de lettres. Un seul point restait obscur : pourquoi donc l’héroïne, une fois dénoué le lugubre drame qui lui livrait définitivement les objets de ses convoitises en la débarrassant du mari, s’enfermait-elle dans le deuil au lieu de jouir avec ses complices des biens conquis par sa scélératesse ? La question aurait pu donner à réfléchir. Mais il y a réponse à tout : on répondait :

— Comédie !

Quelques-uns, mieux renseignés, affirmaient soit que mon fâcheux cousin Jacques n’était pas bien loin, soit qu’on ne tarderait pas à le rejoindre. De plus pervers insinuaient :

— D’ailleurs, qu’importe ! s’il n’est plus là, il y en a d’autres !

Bientôt, des variations extraordinaires amplifièrent le thème que je viens de t’indiquer. On y mêla d’autres personnes. Une voix avança qu’il se pouvait très bien que le colonel Marian ne fût pas le