tels propos pour réfléchir à loisir ; je pensai :
« Peut-être que le Bon Dieu aura miséricorde ! »
Cette question s’agita aussi : Pourquoi s’est-il tué ? Tout à l’heure, à la maison, ma mère déjà la posait à mon père, qui répondait :
— Est-ce qu’on sait !…
Mes petits camarades, eux, étaient mieux renseignés, bien que leurs renseignements ne concordassent guère. En me rapprochant de leur groupe, j’entendis l’un d’eux affirmer :
— … C’est parce qu’il avait des chagrins !
Un autre, aussi péremptoire, rectifia :
— Mais non, c’est parce qu’il n’avait plus d’argent.
Frédéric Laurent, un vigoureux gaillard, très méchant, avec qui j’avais souvent maille à partir, m’interpella :
— Tu dois savoir, toi qui les connais.
Je fus obligé de répondre :
— Non, je ne sais pas.
Cela me semblait de peu d’intérêt : la curiosité des motifs ne me tourmentait pas, car la phrase terrible de tout à l’heure continuait à tourner dans ma tête : mon angoisse, c’était de savoir ce qui l’attendait, là-bas, le pauvre homme que je plaignais ; mais je sentais bien que personne, pas même Frédéric Laurent, n’au-