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À deux ou trois reprises, il prêcha sur des textes indulgents ou hasarda, dans ses prônes, quelques allusions. Peine perdue !

Ma pauvre marraine, qui trouvait quelques consolations dans la maison de Dieu, se la vit à la fin fermer par les méchantes gens. Et quand elle cessa de fréquenter l’église, les Pleigeans s’en réjouirent comme d’une victoire pour la bonne cause.

Du reste, à chaque instant, quelque incident nouveau survenait pour entretenir ou ranimer l’effervescence.

Ainsi, le bruit se répandit un jour que Mlle  Éléonore, qui continuait à voir de temps en temps sa nièce, ne fût-ce que pour augmenter la créance de ses calomnies, avait été mise à la porte du château. On se refusa d’abord à le croire. Il fallut pourtant bien se rendre à l’évidence quand elle-même fit, à sa manière, le récit de sa mésaventure. C’était un acte d’énergie du colonel qu’exaspéraient les aigreurs doucereuses de la vieille fille, ou qui avait eu vent de ses propos venimeux. Ayant remarqué qu’après chacune de ses visites, la comtesse Micheline pleurait davantage, il s’était soudain relevé de son affaissement pour l’exécuter, sans aucun ménagement, d’ailleurs, avec une brutalité de soldat en fureur. Sans se départir de son exaspérante onction, Mlle  Éléonore colportait de maison en maison le détail de la scène :