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ni troubles, ni ennuis. Est-ce à dire qu’il trace d’une main qui ne tremble jamais ses terribles tableaux de dépravation et de vice ? — Non. À quelques mots violents que l’on trouve dans ses notes, qui restent même parfois dans ses romans, on peut saisir l’indignation du satirique.

Il fut un temps où le vieux Juvénal, pour stigmatiser le vice débordé qui submergeait le monde, pressait d’une main puissante les plaies qui saignaient dans Rome. Rien ne l’arrêtait ; il ne reculait devant rien. Il traînait dans la rue le lit de Messaline, montrait du doigt aux passants la femme impure dont il déshabillait l’âme. Cet Empire pourri, pétrifié, saignait terriblement, étalait, aux yeux des passants, de hideuses plaies, que le fouet du poète semblait envenimer encore ; les Bathylles des danses impures, les Locustes, les Astrées impudiques, les Tijellinus éhontés avaient horreur d’eux-mêmes en s’apercevant tachés de boue, souillés de sang, infects, dans le miroir du satirique. Et lui, lui qui remuait cette fange, il ne craignait