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LES ŒVVRES

qui penſent eſtre offencez par moy. Ver. Ô Fortune mamye, ſ’il vous plaiſt d’amender d’oreſ-nauant voſtre condition, que ie vous conduiray biẽ en vn lieu de ſeur accez, où vous ſerez humainement receue par vne excellente perſonne qui me fauoriſe beaucoup, vous ſerez là ſauüee de tous dangers demeurant aupres de moy, & n’aurez plus la peine de tourner continuellement vne roue, comme le miſérable Ixion. For. Ma peine m’eſt agreable, & me ſemble que vous deuriez pluſtoſt dire que ie tourne ma roue, cõme les intelligẽces font tourner les Cieux. Ver. Le mouuoir des cieux eſt proufitable & celuy de voſtre roue dommageable : ainfi l’vn eſt bon, pource qu’il ayde & conſerue, l’autre mauuais, pource qu’il gaſte & ruine. For. Si ne pouuez vous nier que faiſant mal aux vns, ie ne face bien aux autres, tout ainſi que le ſoleil, lequel donnant le iour à ceux qui nous ſont oppoſez nous faict les nuicts par ſon abſence, mais ie voy bien que c’eſt, vous eſtes enuieuſe ſur mon pouuoir, pource que ie fay bien & mal, & vous ne pouuez faire que l’vn des deux. Ver. Si i’eſtois enuieuſe ie ne ſerois point Vertu, car l’enuie en vn grand vice, n’ayez donc point telle opinion de moy ſ’il vous plaift, & ne penſez point eſtre digne de plus d’eſtime pour faire bien & mal, l’ennemy du genre humain ſeroit en cela de moitié de loüange auec vous : quantà ce que vous m’arguez