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EPISTRE A MA
fille


Les anciens amateurs de ſçauoir,
Diſoiẽt qu’à Dieu faut rẽdre le deuoir,
Puis au pays, & le tiers au lignage,
Les induiſant à force de courage,
Soit quelques fois pour ſouffrir paſſiõ,
Soit pour dompter la forte affection.
Au ſeigneur Dieu ie porte reuerence,
Pour mon pays, ie n’ay point de puiſſance,
Les hommes ont toute l’autorité,
Contre raiſon & contre l’équité :
Mais enuers toy fille qui m’es ſi proche
Ce me feroit vn grand blaſme & reproche
De te conduire au ſentier plus battu,
Veu que ton cueur est né à la vertu,
Il ne ſuffit pourtant d’eſtre bien nees,
Le ſens acquis nous rend morigences,
Et le flambeau dans noſtre ame allumé
Sans le ſcauoir eſt bientoſt conſommé.
La lettre ſert d’vne ſaincte racine,
Pour le regime, & pour la Medecine :
La lettre peut changer le vitieux,
La lettre accroiſt le cueur du vertueux,
La lettre eſt l’art qui prenant la matiere
Luy peut donner ſa forme plus entiere.