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LES OEUVRES

Qui eſtaint les eſpris par ſon ardeur nuiſante
Nous cauſe le treſpas, nous met au tombeau,

Le ſomme va ſemant de roſes & de lys,
Les beaux traits delicats d’vne plaiſante face,
Et l’effroyable mort dans l’horrible creuaſſe,
D’vn ſepulchre odieux les tient enſeuelis,

Le ſommeil reſpirant mille petits zephirs,
Careſſe doucement le dormant en ſa bouche,
Et la mort terniſſant vne vermeille bouche,
Eſtouffe pour iamais ſes gracieux ſouspirs.

Apres un long ſommeil l’homme ſe ſent diſpos,
Pour aller au palais, à la Cour, à la guerre,
La mort renge au ſuere, en la bière, en la terre,
Et meurdriere corrompt les nerfs, la chair, les oz.

Le ſoleil, & ſommeil ont preſque meſmes noms,
Meſmes effects auſſi : l’vn nous donne la vie,
L’autre empeſche que toſt elle ne ſoit rauie,
La couurant, curieux, deſſoubs ſes aillerons.

O gracieux ſommeil, riche preſent des Dieux !
Tu ne pouuois loger en vne part plus digne
Que celle que tu tiens, puis que l’ame diuine
A ſa demeure au chef, & ſa feneſtre aux yeux.

Ne m’abandonne point, o bien heureux ſommeil,
Mais vien toutes les nuicts àbaiſſer la paulpiere,