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dats qui vinrent le chercher, prenez cette bourse, elle est pour vous ; mais donnez-moi votre parole de militaire que vous ferez remettre à mon fils cette relique, que j’ai toujours portée avec moi. Le soldat en fit la promesse solennelle..................

 

Non, je n’irai point plus loin, ô mon père ! mon tendre père ! Je ne retracerai point tes derniers moments, ta magnanimité, ton supplice !… Que dis-je ! ton martyre : et quand on meurt pour une cause pareille, les palmes éternelles sont votre récompense. Noble victime de ton honneur, tu péris en me laissant sur la terre pour te pleurer. Affreux souvenir ! quand j’écris ces lignes, mes larmes coulent ; mais ta mort ne m’effraie pas. Ô mon père ! du haut du ciel que tu habites, laisse tomber sur moi tes regards paternels ; vois ton fils digne de toi, déplorant ses erreurs, marcher dans la route que tu lui as tracée ; vois-le prêt à suivre ton exemple, et te montrer qu’il est digne de te devoir le jour.

Le lendemain de cet exécrable assassinat, ma mère, pour la première fois, demanda à me voir. On me conduisit vers elle. À mon aspect ses pleurs, jusqu’alors retenus, coulèrent en abondance. Elle m’entoura de ses bras : — Mon fils ! s’écriait-elle, mon cher fils ! ils ont égorgé ton père : les monstres ! ils se sont enivrés de son sang ; mais tu vis, tu restes pour le venger. Viens, Philippe, n’est-ce pas