Page:Rochemond - Mémoires d’un vieillard de vingt-cinq ans, 1887.djvu/76

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
60

oiseau, que nombre de maris ne peuvent point entendre sans frémir, éleva constamment la voix pendant les instants de souffrance de ma mère ; on dit qu’en naissant j’étais formé, mais formé comme on ne l’est point à cet âge ; aussi le docteur, qui se mêlait de tirer des horoscopes ne put s’empêcher de s’écrier : „Ah ! l’heureux fripon ! Quel bel avenir il se prépare !” Cette exclamation fut entendue d’une des femmes de maman, qui eut grand soin de me la redire plusieurs années après, dans un temps…

N’anticipons point Dis-moi, lecteur, fais-tu comme moi qui jamais ne demande, au sujet des individus que je rencontre, que leur nom, sans m’informer du reste ? Peut-être es-tu curieux ? Eh bien, je vais te contenter, et je prétends te faire faire connaissance avec mon caractère ; auparavant, nous allons parcourir une galerie de portraits qu’il est nécessaire de te montrer.

As-tu rencontré dans le monde un jeune homme aux yeux noirs, grands, et peignant, comme dans toute sa figure, une douce sensibilité ; ayant un cœur porté à l’amour platonique, étant bon, honnête dans ses sentiments, plein de candeur et de délicatesse, franc à l’excès, ennemi des modes nouvelles, des caprices du jour, et croyant encore que la vertu peut exister sur la terre ?

As-tu vu près de lui un étourdi, emporté,