Page:Rochemond - Mémoires d’un vieillard de vingt-cinq ans, 1887.djvu/523

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
234

bliquement démenti. Que de larmes ! que de promesses mensongères sont venues me contraindre à lui céder ! L’amour a étouffé la voix sacrée de l’honneur. Je n’ai plus été ce que je devais être ; je suis devenu l’instrument de la perfidie : leçon épouvantable pour tous ceux qui comme moi s’attacheront dès leur début à des femmes dont la société est aussi pernicieuse. Qu’elle est immense, la différence qui existe entre de pareils hommes et entre ceux qui ont porté leur premier hommage à d’innocentes beautés qui sont encore vertueuses, même en cédant au délire de leurs sens ! Ne craignez rien pour ma santé ; je commence à être hors de danger, puisque je vous écris moi-même. Mes blessures se cicatrisent ; j’espère pouvoir sortir de mon lit avant la fin du mois. C’est ici le lieu de rendre une justice éclatante au généreux Philippe ; je ne doute pas que sa modestie ne vous ait tu sa conduite envers moi après qu’il m’a eu couché sur la poussière ; ce n’a plus été mon ennemi, il s’est précipité sur moi, il m’a prodigué les plus tendres soins ; depuis lors il envoie deux fois par jour savoir de mes nouvelles ; ses amis sont venus me voir d’après le désir qu’il leur en a témoigné ; il est aussi venu hier. À sa vue j’ai rougi ; mais c’est avec la plus aimable délicatesse qu’il a cherché à diminuer mon embarras, il a diminué mes torts, il a exagéré les siens : « Adelphe, m’a-t-il dit, notre conduite a été