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naturelle, son humeur peu cérémonieuse ; il jouait la comédie à ravir ; il était galant auprès des femmes, et poli pour les hommes. Parmi les sociétés dans lesquelles il était admis, Alexandre ne tarda pas à distinguer celle de M. de Clagni, père d’une foule de jolies demoiselles ; celui-ci se voyait l’objet des avances d’une foule de jeunes gens qui, formés dans les grands principes, voulaient d’abord, en plaisant au père, se faire mieux voir des jeunes personnes. D’Oransai ne se définissait pas trop bien quel était le sentiment qui le conduisait si constamment dans cette maison.

Une aventure qui lui arriva quelques jours après, lui apprit à lire clairement dans son cœur. Aux portes de la ville, M. de Clagni possédait une terre charmante qu’il embellissait encore chaque jour ; de superbes terrasses placées en amphithéâtre formaient un immense jardin orné de vastes bassins de marbres, de riches statues, de belles salles de bains, de bois délicieux ; l’intérieur, plus magnifique encore, attirait la curiosité publique. Pendant les chaleurs de l’été, M. de Clagni, suivi de sa famille, se retirait dans ce charmant séjour. D’après une invitation commune à lui et au chevalier d’Entremont, Alexandre avait la permission de venir quelquefois faire sa cour à madame de Clagni, et il profitait amplement de cette aimable faveur. Un après-dîner il venait d’arriver ; M. de Clagni s’était retiré dans son