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heur ? Justine, je ne sais, mais de sinistres pensées viennent m’affliger sans cesse ; tous mes crimes passés se retracent à ma vue ; pendant la nuit mon lit qui repousse le sommeil, est entouré des ombres de ceux qui me durent leur perte. Que je suis faible ! je crois du moins les voir ; ils me glacent, ils me présagent la mort. Ah ! qu’elle ne tarde point, qu’elle vienne, je l’appelle, je l’appelle, je l’invoque ; un sommeil éternel me guérira de tous mes maux… ! Dormirai-je éternellement… Oh ! pensée désespérante, et toi,… toi, source première de mes infortunes, barbare Philippe, te riras-tu de ma douleur sans en être puni ? Te verrai-je tranquillement le bienheureux époux de cette odieuse Honorée ! Elle est revenue, elle a paru, et sa présence a soudain fixé pour jamais le volage d’Oransai ; il ne soupire qu’après l’instant de son union avec elle ; et, je le laisserais s’unir sans y apporter des obstacles ! Si je le faisais, je ne serais pas moi. Non, Philippe, ne te flatte point de posséder Honorée avant que je t’aie puni ; je veux que la société dont tu brigues les suffrages avec tant de soin, te repousse comme le plus méprisable des calomniateurs ; je veux que la haine publique… Eh ! sais-je ce que je veux ? N’importe, il faut que je me venge, dussé-je périr l’instant après. Adelphe de Melclar, qui toujours m’adore, qui m’aime d’autant plus qu’il ne me possède pas ; Adelphe est digne de me