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en passant Alexandre entendit ce propos ; deux heures après, comme il descendait les escaliers de la salle de spectacle, Martin (c’était le nom de l’officier) vient à lui et le frappe du coude rudement.

— Monsieur, lui dit Alexandre, en l’arrêtant, je ne suis point aussi sévère que vous ; en me heurtant avez-vous eu l’intention de me manquer, ou bien cette rencontre a-t-elle été celle du hasard ?

— Elle sera ce que vous voudrez, mon jeune officier, lui répondit Martin en ricanant.

— Eh bien, répliqua Alexandre, sans s’émouvoir, elle sera pour l’un ou pour l’autre l’arrêt de mort.

Il dit, et ces mots prononcés avec une fermeté extraordinaire, portèrent un trouble, précurseur d’un danger éminent, dans l’âme de Martin ; mais il n’était plus temps de reculer, il fallait combattre. Sur-le-champ les deux adversaires choisissant leurs seconds, s’éloignent de la ville, et un combat terrible va commencer, éclairé par la faible clarté de la lune. Alexandre, indigné du procédé de Martin, et résolu à ne plus recommencer, préférait périr que de ne pas tirer vengeance d’un aussi infâme procédé. Au moment de se mettre en défense, le souvenir de son père, de sa mère chérie, vinrent apporter la douleur dans son âme ; cependant, loin de se livrer à ces tristes idées, il cherche à les détourner, et prête toute