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PHILIPPE.

Vous ordonnez donc le silence à ceux qui vous entourent ?

MATHILDE.

Encore !

PHILIPPE.

Toujours.

MATHILDE, après un moment de silence.

Je ne sais quelle cause a pu donner naissance à cette manie qu’ont les hommes, d’accabler d’éloges exagérés les femmes qu’ils voyent pour la première fois ; il faut qu’ils aient une extrême opinion de notre faiblesse, pour se permettre d’imaginer que quelques compliments doivent nous prévenir en leur faveur.

J’allais répondre à cette attaque, lorsque Charles de Mercourt, qui brûlait du désir de causer aussi avec la belle Mathilde, s’approcha, suivi de sa cousine. La conversation devint alors générale ; je cherchais toujours à me faire distinguer, soit par mes opinions, soit par mes épigrammes. Plus d’une fois je vis Mathilde sourire à mes propos ; j’espérais alors, mais l’instant d’après je la voyais traiter Charles avec une affabilité qui me désespérait. Nous continuâmes longtemps à nous promener, enfin madame de Téligni donna le signal de la retraite ; plus heureux que Charles, je ramenais