Page:Rochemond - Mémoires d’un vieillard de vingt-cinq ans, 1887.djvu/469

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
180

eu quelques aventures un peu obscures qui ont contraint le papa à la reléguer dans un couvent dont elle n’est sortie que depuis quelques semaines : je l’ai revue sans que sa présence vînt rallumer des feux qu’elle n’alluma qu’un moment. Eudoxie de Norris, toujours jolie, a donné dans une réforme peu croyable : elle n’est pas dévote, la chose lui serait impossible, mais elle est devenue savante, et voilà qu’un chacun la fuit avec autant d’empressement qu’on en mettait autrefois à se rapprocher d’elle. Laure de Montalbain s’est mariée ; elle a bien fait pour mon repos, pour le sien, comme pour celui d’Honorée. Jenni, sa charmante sœur, est encore demoiselle, toujours espiègle, toujours enchaînante, tandis que son cœur ne veut jamais se rendre. Les deux campagnardes Rosette et Sylvie après avoir passé de main en main, sont aujourd’hui dans une solitude déplorable. Célie n’est plus, la mort l’a frappée subitement, et son trépas a si fort épouvanté Adeline, que celle-ci a renoncé au théâtre, et s’est jetée dans les bras d’un pieux confesseur. Pour ma petite Célénie, elle est partie ; maintenant les Bordelais possèdent ses charmes. Me voilà par conséquent entièrement délaissé ; si maintenant le ciel ne vient à mon secours, je crois que je périrai d’ennui ; le destin m’en préserve !