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ANAÏS.

Lorsqu’on est franche on s’avoue coupable.

PHILIPPE.

Vous êtes donc inconstante ?

ANAÏS.

Mais, dites-moi, êtes-vous plus fidèle ?

PHILIPPE.

Vous récriminez vos erreurs ; quoi ! parce que j’ai pu être volage, pensez-vous qu’il ne fût point facile de m’enchaîner ? Si j’ai changé quelquefois, c’était dans le dessein de chercher la femme qui doit m’attacher sans retour à son char.

ANAÏS.

Voilà les propos de tous ceux qui nous ressemblent : j’ai vingt ans, j’ai aimé plusieurs fois, j’ai connu tout le danger d’une constante tendresse ; j’ai vu parjurer des serments qu’on avait promis de tenir jusqu’à la mort ; j’ai vu les êtres fidèles fort à plaindre ; j’ai vu les inconstants toujours joyeux ; je me suis alors rangée sous leurs bannières, et je ne les abandonnerai plus.

PHILIPPE.

Vous serez constante à l’inconstance ; ainsi il faut perdre le doux espoir de vous inspirer une flamme durable.