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une jeune personne revêtue de ces attraits qui font tourner mille têtes et d’un tempérament qui rend bien faible pour ceux que l’on a blessés ; la taille de mademoiselle Anaïs était parfaite, un peu trop forte, peut-être, mais n’en ayant que plus de charme ; son œil noir possédait une expression inconcevable, c’était plus que du feu qui l’embrasait ; la bouche d’Anaïs toujours entr’ouverte, annonçait l’étendue de ses désirs ; l’émotion active de son sein, le coloris de ses joues, la blancheur de son teint, la noirceur de ses cheveux, une petite moustache bien légère qui sillonnait sa lèvre supérieure, tout se réunissait pour en faire l’un des plus agaçants minois qu’il fût possible de rencontrer.

Mon arrivée avait dérangé mademoiselle de Montaigle du piano qu’elle occupait ; les premières cérémonies terminées, après que réciproquement nous nous fûmes examinés, je priai instamment la belle châtelaine de continuer son gracieux exercice.

« Je serais, ajoutai-je, au désespoir si ma présence apportait quelque privation à la société qui se trouve ici réunie. »

Car tu sauras, Maxime, qu’outre monsieur, madame, mademoiselle Montaigle, le salon renfermait de plus une quinzaine d’individus de l’un et de l’autre sexe. Sans faire les minauderies à la mode parmi les jeunes personnes qui ont des talents, la séduisante Anaïs se