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Les bouts-rimés, les vers amusèrent la compagnie : on se rapprocha. Le dîner vint sceller cette nouvelle union, et à la couchée on était de la meilleure intelligence.

Madame d’Hecmon espérant de retrouver Alexandre à Paris, où ils se rendaient tous deux, voulant d’ailleurs apaiser son oncle de route, fut tranquille, et laissa pendant tout le reste du voyage les deux jeunes gens se livrer à leurs brûlantes caresses. Chaque nuit Alexandre allait causer avec Lucile ; chaque nuit Lucile s’instruisait davantage ; et lorsqu’elle arriva dans la capitale de la France, on ne l’aurait point prise pour une niaise provinciale, tant l’esprit vient aux filles avec facilité. Elle promit, en se séparant, d’aimer toujours Alexandre ; mais comme elle ne devait plus le revoir, ce serment fut oublié avec la même facilité. Quant à d’Oransai, il ne promit rien en débarquant à l’hôtel des Messageries. Les divers voyageurs, après avoir renouvelé leurs assurances de souvenir, et s’être fait de réciproques civilités, se séparèrent.

Le gentilhomme prit le chemin du Marais ; le négociant, celui du boulevard des Italiens ; le chanoine fut loger dans la Cité, rue Saint-Louis, no 9, ainsi que le portait l’adresse que sa nièce glissa dans la main d’Alexandre ; la vieille dame et Lucile furent s’établir place Dauphine ; et le jeune d’Oransai, dans l’hôtel de Bretagne, rue Saint-Honoré.