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l’acheteur ; malheureusement je me trouvais impliqué dans cette affaire, j’en ai eu vent, et me voilà faisant partout un tapage de diable, bien décidé à tout faire manquer. Ce matin, le hasard m’a conduit devant la porte de M. T..... ; je l’ai vu sortir à pied, sans décoration, enveloppé dans une espèce de redingote qui sentait furieusement la bonne fortune ; je n’ai point fait semblant de m’apercevoir de ce qui me sautait aux yeux, mais à pas de loup, j’ai, par derrière, suivi doucement notre magistrat coquet ; il a pris par des rues détournées, malgré qu’il ne se crût point poursuivi. Enfin, il est arrivé au lieu où je le soupçonnais d’aller, c’est-à-dire dans la maison de Célénie ; il avait eu à peine le temps de monter dans l’appartement que je suis entré dans la cour ; là je n’ai pas médiocrement été surpris de rencontrer la facile maman. Il me semblait que vu l’honorable visite qui lui était faite, elle aurait dû être auprès de M. T..... De son côté, si elle a eu quelque étonnement de me voir, ce n’a par été de plaisir : elle a pâli, rougi ; elle m’a demandé en balbutiant ce que je venais faire à une heure pareille ; affectant la plus grande ingénuité, j’ai répondu que des affaires m’ayant conduit dans ce quartier, je n’avais pas voulu passer sans leur avoir rendu mes devoirs respectueux ; elle m’a remercié, et, m’a-t-elle ajouté, Célénie, qui était à la répétition, serait bien