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odieux imposteur, tu ne peux pas m’en imposer ; non, le ciel ne peut protéger le crime ; si plus adroit, tu fusses venu me parler de tes remords, alors peut-être j’eusse pu croire que la puissance suprême te contraignait à revenir sur la terre pour expier tes forfaits ; mais, hélas ! il n’en est rien, un sort funeste t’a conservé la vie que tu devais perdre sans retour ; le repentir n’a point eu accès dans ton âme, et tu n’as poursuivi le cours de ton existence que pour commettre de nouveaux attentats. »

— « Oui ! vous l’avez deviné, reprit-il, je vis encore, et je vis dans la pensée de faire votre malheur ; l’amour que j’avais pour vous s’est changé en une haine virulente ; j’ai soif de vos pleurs, je désire votre perte ; vos angoisses, celles de Philippe, mon détestable rival, pourront seules me rendre quelque ombre de joie ; vous êtes la cause qu’il m’a fallu quitter ma patrie, qu’en France ma tête est menacée. Couple exécrable que j’abhorre, je ne veux que vos souffrances, et toute ma vie sera consacrée à les réunir sur vos têtes. Toi surtout, Honorée, toi que je tiens en mon pouvoir, tremble de tous les excès auxquels peut se porter ma rage : tu ne peux m’échapper, ma puissance t’environne, et tu ne sortiras que souillée et malheureuse. »

La grandeur du danger qui me menaçait,