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vérité ne tardera pas à se montrer sans voile à vos yeux.

Dans le temps que Léopold me parlait ainsi, nous avions quitté la grande route, et par des chemins de traverse nous étions parvenus au bas d’une colline escarpée.

— Est-ce ici que votre voiture doit nous attendre, lui dis-je ?

— Avant de la rencontrer, répliqua-t-il, il nous reste à gravir ce monticule.

Nous nous remîmes à marcher, nous gagnâmes le sommet de la colline, et quand nous y fûmes arrivés, jetant mes yeux tout autour de moi, je n’aperçus d’aucun côté ni voiture, ni même aucune créature animée. Le crépuscule me permettait encore de distinguer assez loin les objets dont nous étions environnés ; la colline offrait de toute part une surface stérile, et sur ses flancs ne s’élevait aucun arbre, aucun rocher qui pût permettre à qui que ce soit de se cacher. Ainsi, Léopold et moi, nous étions les seuls êtres vivants dans la circonférence d’un quart de lieue de diamètre. En ce moment, la figure de Léopold se revêtit d’une teinte plus forte de gravité.

— Philippe, me dit-il, avant d’aller plus loin, il est nécessaire que je vous interroge. Avez-vous en moi une confiance entière, illimitée ? Me croyez-vous votre ami, et pensez-vous que ma conduite vous ait paru digne de blâme ?