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méprisables personnages. Vaincu par ses discours, subjugué surtout par son ascendant irrésistible, je l’embrassai tendrement, et je lui jurai de nouveau de ne plus voir ceux dont il redoutait pour moi la colère.

— Ah ! Philippe, me dit-il, vous ne savez pas quel bien vous venez de nous faire en m’assurant que vous abandonneriez une société pernicieuse : désormais vous serez hors de leurs atteintes, et c’est maintenant à Léopold à vous protéger.

Il prononça ces mots d’une manière solennelle, et qui m’étonna.

Maxime, je ne sais, mais il me semble que ce Léopold doit influencer de beaucoup le cours de ma destinée future ; aujourd’hui que je le connais mieux, sans cependant avoir percé le miraculeux mystère qui l’enveloppe, je suis porté à avoir pour lui la vénération qu’on doit avoir pour des êtres supérieurs et bienfaisants.

— Philippe, poursuivit-il, il pouvait naître d’une trop intime fréquentation de vous avec madame Derfeil et Émilien, un grand changement dans votre caractère ; avant peu la dissimulation eût remplacé votre franchise naturelle : vous êtes léger, sensible, vous seriez devenu faux et méchant ; un vase d’or qui contient une eau corrompue, devient lui-même le foyer des miasmes pestilentiels ; aujourd’hui vous avez rompu d’indignes chaînes, et la