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qui n’avait pas la connaissance de l’assiette du pays ; ses vieux créneaux, ses tours élevées servaient maintenant de retraite aux hiboux taciturnes, aux féroces vautours ; le lierre, se cramponnant à des murs ruinés, soulevait insensiblement des pierres énormes qui avaient résisté au choc du bélier, ainsi qu’aux efforts terribles de l’instrument des combats. À la vue de ce château il me vint dans l’idée que si je montais sur une des tours dont il est environné, je pourrais porter au loin mes regards, et faire quelques découvertes qui me seraient utiles. Séduit par cette idée, je ne réfléchis pas que si le château n’est pas habité, il doit être l’asile des brigands dont je veux déjouer les complots. À l’âge que j’avais alors, on agit plus souvent qu’on ne réfléchit. La première porte n’existait plus, j’entrai sans obstacle dans la cour, et sans m’approcher du bâtiment, je vais droit aux remparts pour trouver l’un des escaliers qui doivent me conduire au but que je me propose ; une petite porte cintrée se présente sur mon passage, je la franchis, et je monte les degrés qui sont devant moi ; à moitié ruinés par le temps, ils ne m’offraient qu’un appui peu solide ; montant avec précaution, j’arrive à la moitié de la hauteur de la tour. Quel objet s’offre à moi ! Dans une chambre dévastée était couchée sur un plancher sanglant, une femme morte depuis quelques jours, et percée de plusieurs coups de poignard.