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vapeur matinale, je voyais flotter les enseignes et briller les armes frappées par les premiers rayons du jour.

Charles venait de me rejoindre ; le bel Emanuel, suivi de la fière Célénie, passèrent à côté de moi, et me saluèrent avec allégresse, tandis qu’à leur vue un pressentiment secret vint m’arracher une larme involontaire. L’aumônier de mon bataillon nous bénit tous. À genoux, dans un humble recueillement, nous appelâmes à notre secours le Dieu des armées ; et le souvenir de la vision dont j’étais encore ému me prêta d’énergiques expressions, dont je me servis pour animer davantage les soldats dont je devais répondre. Je leur rappelai nos premiers exploits, qui devaient être l’augure de ceux de la journée : tous m’assurèrent de leur valeur ; je me plus à les croire ; et ayant reçu les derniers ordres du chevalier d’Aut....., je donnai le signal.

Le roulement du tambour se fit entendre à la fois sur toute l’étendue de la ligne. Vêtu d’un habit orné d’une écharpe blanche, à frange d’or, portant un panache blanc sur mon chapeau, je parus à la tête de ma troupe, et voulant donner moi-même, je mis pied à terre ; ayant mis mon épée à la main, je partis le premier, en poussant le cri de vive le roi ! qui fut répété par toute l’armée, et dont les échos retentirent. Les phalanges vendéennes se déployant avec ordre, attaquèrent par