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de ses paroissiens qui conservaient des sentimens d’honneur et d’amour pour l’ancienne dynastie ; il leur apprit que j’allais paraître, et que c’était sous les armes qu’on devait recevoir son jeune suzerain.


Le bruit de mon arrivée se répandant sourdement, les autorités envoyèrent sur-le-champ une estafette pour instruire le général républicain combien il y avait à craindre que ma seule présence ne nuisît aux intérêts de la liberté, et que s’il n’envoyait pas des troupes, il serait très-possible que la ville entière se déclarât pour les royalistes.

Le méchant Saint-Clair, en écoutant son père lorsque celui-ci lui eut raconté le détail et le peu de succès de son entreprise auprès de madame d’Oransai, jura de tirer une vengeance éclatante de ce qu’il appelait une insulte faite à son rang comme à sa personne : il était encore violemment irrité contre Hippolyte, qui l’avait trahi. Il se promit la perte de ce jeune homme, celle du duc de Barene, celle de ma mère et la mienne enfin, car sa jalousie devina que, malgré ma jeunesse, j’avais pu concevoir la pensée de m’unir à ma cousine, la possibilité de cet hymen si naturel ne servit point peu à l’enflammer contre moi : ne voulant point perdre de temps, il rédigea contre nous tous une dénonciation perfide, qui devait nous appeler à l’échafaud