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sans donner assez de passage à la lumière, éclairait cependant ces ténèbres visibles. Là, je fus ensevelie à quatorze ans, avec la perspective de la mort, car rien ne pouvait m’y soustraire, puisque j’avais attaqué la vie d’un chef républicain.

Ce fut alors que les prisonniers Vendéens apprirent mon nom au représentant qui s’était chargé de les interroger. Comme je me trouvais être d’un sang illustre, on mit moins d’empressement à me condamner, Saint-Clair formant sur cette origine des projets qui ne tardèrent pas à se manifester. J’étais enfermée depuis quelques heures, lorsque l’adjudant Hippolyte vint, par l’ordre du général, me retirer du cachot dans lequel j’étais renfermée, et me ramena dans la chambre que j’occupais auparavant ; il me fit ôter les fers dont on avait eu soin de me charger, et ordonna, toujours de la part du général, que je fusse traitée avec toutes sortes d’égards. Je lui demandai alors si la blessure de Saint-Clair était dangereuse ; il me dit que non, et d’un air que ses yeux démentaient il ajouta que le crime dont j’avais voulu me souiller ne ravirait pas à la république le général Décius Saint-Clair. Me voilà de nouveau seule ; toute la journée s’écoula sans qu’Hippolyte pût reparaître ; je ne vis que la femme chargée de m’apporter quelque nourriture.

Le jour suivant, je le passai également dans