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Je ne m’abaissai pas à lui répondre ; mais, d’un coup d’œil, je le fis rentrer en lui-même ; son ton changea : il m’assura que c’était mon bien qu’il voulait ; que ma seule présence intéresserait en ma faveur le représentant du peuple, sans lequel il ne pouvait rien. Pour la première et la dernière fois, Saint-Clair cessa d’être lui-même. Je ne crus point devoir m’opposer, plus long temps, au désir qu’il me témoignait ; et je le suivis sans une répugnance trop marquée.

Lorsque j’entrai dans la salle, tous les assistants se levèrent et me saluèrent unanimement. L’assemblée était nombreuse. Saint-Clair me conduisit vers le représentant, et me fit asseoir entre eux deux. Vis-à-vis de moi était Hippolyte : en le voyant, je ne pus m’empêcher de lui marquer, par une légère inclination de tête, combien j’étais sensible à l’intérêt qu’il m’avait témoigné. La conversation devint générale ; et je dois rendre cette justice aux militaires qui se trouvaient au souper, qu’aucun d’eux n’oublia qu’il était en présence d’une jeune demoiselle. Le représentant et Saint-Clair employèrent leur adresse pour savoir quel était le nom de ma famille ; et moi, tremblante pour mon père, je me refusai à satisfaire leur curiosité. Ils parvinrent cependant à tout savoir : les prisonniers Vendéens, croyant qu’en me nommant, on aurait pour moi de plus grands égards, leur apprirent, le lendemain, ce que