Page:Rochemond - Mémoires d’un vieillard de vingt-cinq ans, 1887.djvu/188

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
172

violer la promesse qui nous a été faite en votre nom. Ce peu de paroles étonna Saint-Clair (vous l’avez deviné à son discours).

— Audacieux, me dit-il, es-tu le chef de ces factieux ?

— Que t’importe. Dois-je éprouver un traitement différent du leur ? Je disais, et Hippolyte qui s’intéressait déjà à moi, craignant que je n’allumasse la colère dans l’âme de Saint-Clair, se hâta de dire qu’il fallait nous conduire au dépôt des prisonniers. Nous fûmes amenés. Comme on voulut nous dépouiller de nos uniformes, je fus reconnue pour être une femme, et cette nouvelle circula jusqu’aux oreilles de Saint-Clair. Il voulut me revoir, malgré moi je fus contrainte à reparaître devant lui. Cette fois, son front n’était pas aussi sévère ; mais son regard, toujours méchant, avait pris de plus une teinte de je ne sais quel affreux et dégoûtant sentiment. Quoi qu’il en soit, lorsque son œil se porta sur moi, je ne pus m’empêcher de frémir : il n’avait avec lui qu’Hippolyte.

SAINT-CLAIR.

Se peut-il que le soldat qui m’a parlé avec tant d’audace, qui a si longtemps refusé de se rendre, soit une femme ?

HONORÉE.

Vous voyez, citoyen, que le sexe n’ôte rien au courage.