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madame de Cerneuil, je fus conduite par cette dame dans le pays occupé par les royalistes ; j’ai sucé leurs opinions, leur enthousiasme pour la cause qu’ils soutiennent, et ce n’est que parmi eux que je puis librement respirer. Parmi les compagnons de notre fortune, à l’âge de treize ans je n’avais encore distingué aucun cavalier, quoique plusieurs eussent cherché à m’émouvoir en leur faveur ; loin d’eux était la pensée de profiter de la familiarité qui, nécessairement, devait naître de notre manière de vivre. Me reposant sur leur loyauté, l’idée de dangers ne pouvait se présenter à moi ; jamais ma sécurité ne fut déçue ; les nobles Français respectèrent une infortunée, et leur amour ne l’alarma point un moment. Vêtue en amazone, je combattais tous les jours ; tantôt vaincus, quelquefois triomphants, jamais abattus, les Vendéens disputaient pied à pied leur sol natal aux phalanges républicaines. Victorieux auprès de Saint-Fulgent, Charrette se préparait à occuper cette ville ; un corps de voltigeurs fut commandé par lui pour battre la campagne aux environs. Un funeste désir de me signaler me porta à suivre les soldats envoyés à la découverte. Nous venions de dépasser un petit bois, lorsque nous fûmes accueillis par une fusillade qui nous apprit le danger auquel nous étions exposés. Cernés de toute part par une division de l’armée ennemie, la retraite nous était interdite, il fallait