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parler à mon cœur ; je ne puis rester dans Nantes sans me rendre coupable. Dès demain je pars ; et si la renommée ne proclame pas bientôt mon nom, je saurai toujours trouver une mort glorieuse, qui te forcera du moins à pleurer sur ma mémoire…

— Ô mon fils, me dit ma mère en se montrant tout à coup, combien j’aime les transports qu’Honorée a fait naître dans ton âme. Arme-toi, il en est temps. Les vassaux de ton père ont, jusqu’à ce jour, refusé de faire cause commune avec le reste de la Vendée. Nous voulons ne combattre, se sont-ils plusieurs fois écriés, que lorsque notre jeune seigneur pourra paraître à notre tête… Va, par ta présence, ranimer leur valeur. Rappelle-toi, mon fils, que depuis les époques les plus reculées de la monarchie, tes aïeux ont prodigué leur sang pour la cause de leurs souverains. Imite-les, Philippe ; souviens-toi toujours que, du haut des cieux, ton père te contemple. Que son trépas ne t’intimide point : il est beau de mourir pour une aussi belle cause.

L’apparition de ma mère, ses paroles, celles d’Honorée, l’honneur se réveillant dans mon cœur, je sentis que je n’étais plus le même. Madame d’Oransai sort un moment ; elle revient de suite — Prends, me dit-elle, ce fer ; il appartint à ton père, il fut l’instrument de ses exploits ; qu’il le soit des tiens !

— Oui, oui, leur dis-je, vos souhaits ne