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ensemble ; au moment de se retirer, madame Derfeil remarqua avec inquiétude que la pluie tombait par torrents ; comme j’avais un parapluie, je lui fis la proposition de la reconduire ; elle accepta, et nous voilà dans la rue. — Il faut avouer, me dit ma compagne de course, que madame de Ternadek est une femme bien aimable.

— Et une excellente amie, répondis-je avec vivacité.

— Oui, reprit madame Derfeil : sans avoir l’honneur de vous avoir jamais vu, je vous connaissais déjà ; madame de Ternadek avait eu le soin de me dire plusieurs fois combien était aimable M. d’Oransai. Je croyais, je l’avoue, que ces éloges étaient peut-être un peu trop dictés par l’amitié, mais aujourd’hui je dois convenir, avec franchise, qu’ils m’ont paru au-dessous de la vérité.

Il était lancé à bout portant, ce coup d’encensoir ; on me voulait du bien, la chose est claire, mais le triple amant de Fanchette, passons vite, d’Euphrosine, d’Honorée, était aveugle auprès d’une femme qu’il n’aimait point ; mon inattention fut mon premier crime auprès de Clotilde (c’est le nom de madame Derfeil) ; elle m’en a toujours voulu.

Après avoir accompagné Madame Derfeil jusqu’à sa porte, je rentre chez moi. On m’attendait pour se mettre à table ; je dis, pour me justifier, qu’il m’avait fallu accompagner une dame.