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écartés, je les passe autour de son beau corps : elle m’imite, et nous restons au moins dix minutes ainsi, occupés à nous presser l’un contre l’autre, à nous renvoyer mutuellement les flammes qui s’allumaient dans nos yeux. Bientôt les baisers se succèdent, s’échauffent, nous transportent ; ma main enlève le voile grossier qui renfermait ces deux globes qu’il est si doux de presser. Je baise, je suce ces deux frais boutons, couronne de ce double trésor. À ces caresses je sens Fanchette trembler, frémir et défaillir. À moitié égaré comme elle, je conserve cependant assez de force pour la traîner sur mon lit ; je la couche, je me place sur elle, je l’embrasse, je m’agite avec fureur ; violemment excitée, mes caresses, mes transports, tout m’est rendu par la délirante Fanchette. Elle se remue, je sens qu’elle désire que j’ose davantage ; mais un sentiment que je ne puis définir, m’arrête au milieu de mon triomphe ; un peu de timidité peut-être m’empêche de poursuivre : content de la dévorer, de la mordre, de la serrer, haletant, éperdu, je sens un frémissement délicieux qui parcourt tout mon être : mes yeux se ferment, je pleure, je crie, j’embrasse, mes mains vont partout, l’Élysée m’est ouvert… et je sentis que j’étais un homme. Je me relevai en silence ; de son côté Fanchette, sans rien me dire, mais assurément piquée contre moi de ma gaucherie, s’éloigne, ramasse son mouchoir, et me laisse. Oh ! combien mes idées s’agrandirent en ce