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Le Peuple Romain ayant par lâcheté abandonné Drufus & Neron, enfans de Germanicus, Titus Sabinus Chevalier Romain, ne se peut jamais résoudre à cette infamie, malgré leur disgrace, il ne les quitta jamais. Sectator domi comes in publico, post tot clientes unus, dit Tacite.

Non debes navum tempestate oppressum desinere, qui ad eam tranquille mari venit. Joseph de bell. jud.

ABASTARDIR. V. Degenerer.

ABBAISSER. V. Humilier.

La Providence se sert souvent des plus petites choses, pour nous humilier, infirma mundi elegit, ut confonder et fortia i. Cor. c. i

Le veritable moyen pour nous élever, c’est de nous abaisser, qui via satiari panibus Christi, discumbe super fœnum, imo te ipsum fœnum esse cognosce.

Les grands ne s’élèvent jamais plus haut, que lors qu’ils s’abaissenr. Scilicet qui vere maximi sunt, hoc uno modo possunt crescere, si se ipsi submissant securi magnitudinis sua, dit Costard écrivant à Monsieur de Servien, il avoit tiré ce passage de Pline in Panegyr. Trajani.

L’Empereur Adrien estoit fâché, quand on luy ostoit la liberté de dépouiller sa Majesté, pour familiariser avec ses Domestiques. Matth. en la vue de Louis XI. livre 6.

ABATTRE. Les ames genereuses ne se laissent jamais vaincre dans les adversitez, toutes les disgraces de la nature ne sont pas capables de les abattre, un cœur haut & relevé se range bien-tost aux décrets de la Providence. Contemptor omnium quibus torquetur vita. V. Adversitez. V. Afflictions.

ABBE’. Abbas apud Habreos, veut dire Pere, & dixit Abba Pater, omnia tibi sunt possibilia. Marc. c. 1 4. n. 36. Galat. 4.6.

Les Abbez refusoient de se soumettre à la Juridiction des Evêques, le Concile de Rheims les y a obligez, ils ne voulurent pas y déférer ; le Pape Innocent II. écrivit à Hugues Archevêque de Rouen de ne pas user de son authorité, crainte de plus grands inconveniens. Mezeray en la vie de Philippes Auguste 41. Roy.

Le Pape Innocent III. crie contre les Abbez, qui suis finibus non contenti, manus ad ea, que sunt Episcopalia dignitatis extendunt, cap. extra de excessib. Prælat.

Les Abbez doivent avoir plus de probité, que de science. Bald. in Rub. Cod. de summ. Trin. Ils estoient autrefois si ignorans, qu’on leur expliquoit l’Oraison Dominicale ; cela fut cause, que les Abbesses se méloient de donner de Benedictions, de voiler des Filles, & de les recevoir de leur authorité. leur ignorance estoit accompagnée d’une extrême avarice, de manière qu’ils vendoient tous les Sacremens, au rapport de Mezeray en la vie de Charlemagne.

Du temps de ce Roy on appelloir Abbez les Capitaines qui mangeoient les revenus des Abbayes, & même ceux qui enseignoient l’art militaire aux autres, idem.

On fait auiourd’huy tres-bon marché par tout le Royaume de la qualité d’Abbé, les moindres Ecclesiastiques se l’attribuënt, mêmes ceux qui n’ont aucun benefice, ny esperance d’en avoir, c’est un fantôme de vanité insupportable.

ABEILLES. Apes, ex vitulo sive bove mortuo, les Guespes, Vespe nascuntur ex equo apud Nicandrum. Celuy qui a couché avec une femme, est mordu le lendemain s’il approche de la Ruche, elles sentent d’une lieue les fleurs, dit Scaliger.

Les Abeilles ont parmy elles en chaque Ruche un larron de miel, qu’elles chasse, il n’a point d’aiguillon, & les Latins l’appellent Fucus, c’est ce que nous appelions Bourdon. Il y a divers animaux qui ont parmy eux un Roy de diverse espece, comme les Abeilles, les Ralles, les Cailles, & les Guespes ; Scaliger in Verbo oyseau, y ajoute les oyseaux de Paradis, qui sont sans pieds ; ita baleces, & pediculi, & bos quia socialia sunt animalia.

Il y a bien du plaisir de voir travailler les Abeilles au retour de la belle saison ; lorsque dans les champs fleuris, elles s’exercent au rayons du Soleil par un travail assidu, soit qu’elles mettent hors des Ruches leur nouvelle famille, soit qu’elles affermissent leur miel coulāt, soit qu’elles reçoivēt les charges de leurs compagnes, qui revennent continuellement de la picorée ; cet agréable ouvrage s’avance avec ferveur, & avec une intelligence admirable, de maniere que le miel nouveau fait bien-tôt sentir l’aimable odeur du thin, & des autres fleurs dont il est composé.

ABOLITION. Celuy qui obtient l’abolition de son crime, se met au nombre des innocens, & reprend son premier rang, nomen ejus de Reis eximitur, l. 3. ss. de accusas.

Quoyque la parole d’un Roy soit un fondement inébranlable, neanmoins en matiere de crime de leze-Majesté, il faut toujours faire entériner les lettres d’abolitions au Parlement : Mathieu, en la vie d’Henry IV. livr. 5.

Après la mort du Maréchal de Biron il y eust abolition & Amnistie générale, de manière que les seditieux vivoient à la Cour comme les fidelles sujets, pesle-mesle, on pouvoit dire pour lors avec Seneque. Quale hodie esset imperium, nisi salubris providentia viitos permicuisset victoribus. De ira, cap. 34.

Le traître, le trahy, le mort, & le vivant,
Se trouvent A la fin amy. comme devant.

Corneille.

ABONDANCE. Ceux qui sont gorgez de contentemens & de richesses, ont le plus de trouble & d’agitation ; l’abondance qui devroit causer leurs repos les jette dans une coufusion si grande qu’ils ont peine de se trouver eux-mêmes : Senec. De benfic. lib. 5. chap. 12. V. Possession. V. Rareté.

Quod prosunt multa cubicula in uno jacetis, vestrum non est, ubi non estis. Idem, epist. 89.

Du règne de Loüis XI. les denrées & les marchandises eftoient à tres-vil prix, il fit acheter vingt-quatre pipes de vin de Grave, qui ne coûterent que vingt-huit livres. Mathieu, en sa vie.

Dans le coûtumier de Bourbonnois, on voit, que le mouton ne valoit qu’onze sols six deniers, celuy d’Anjou, arresté en 1506. fait voir que le mouton gras avec sa toison, n’estoit estimé pour lors, que sept fois six deniers : En Auvergne dans ce même temps, le mouton ne valoit que cinq sols suivant le dire du même Autheur ; Ibid.

Les Empereurs Romains se sont toujours étudiez à maintenir les Peuples en abondance. Voyez Pain. V. Populace.

ABORD. Arrivée. Aux advenemens & arrivées des Princcs, on leur demande tout ce qu’on desire d’eux, parce qu’apres leur établissement, ils n’en veulent plus oüir parler ; ce mutin de Percennius ayant disposé tous ses camarades à la révolte, dit : Quando ausuros exposcere, nisi novum & nutantem adhuc principem pracibus, vel arinis adirent, Tacit. annal. l. i.

Aux advenemens des Grands, & de ceux qui ont des dignitez, on juge d’abord de ce qu’ils feront dans l’exercice de leur charge, tant par leurs actions, que par leurs paroles, qui sont les habits d« nôtre


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