Page:Robiquet - Histoire et Droit.djvu/248

Cette page n’a pas encore été corrigée

CORRESPONDANCE DE BAILLY AVEC NECKER. 24.1 l. --16

les empileront ; et vous savez, monsieur, que les bénéfices de ce malheureux commerce sont si restreints qu’il est impossible, sans une perte réelle, qu’il puisse payer des écus au prix où ils sont. Vous savez de même que l’on ne peut payer les ouvriers avec des assignats il faut donc indispensablement des écus. Le commerce doit-il, à ses dépens, approvisionner la capitale ? Vous êtes le père né, le protecteur des citoyens, et, plus spécialement encore, celui de ceux qui approvisionnent votre ville de denrées de première nécessité ; ils vous prennent pour leur juge, et ils vous pri.ent de les juger promptement. Par rapport à l’influence défavorable que le défaut d’écus peut avoir sur l’approvisionnement de 1791, si la municipalité ne vient pas au secours du commerce, il aura l’honneur de vous observer que, pour que la ville de Paris ait son approvisionnement de l’année prochaine, il faut, sous trois semaines, les premières pluies advenantes, commencer dans le fond du Morvan, du Nivernais, à jeter les bois dans les petits ruisseaux naturels ou artificiels, et en faire écouler jusqu’aux ports flottables en trains la plus grande partie possible, afin de pouvoir en faire les tirages, triages et.la mise en état avant les neiges et les glaces. Si l’on manque cette occasion, un hiver sec compromettra l’approvisionnement et la disette sera inévitable, surtout cette année 179l qui ne peut être approvisionnée que de bois de flots fort éloignés car l’on commence à brûler les bois neufs, destinés pour l’ordinaire 1791, l’hiver dernier s’étant passé sans neiges et le printemps ayant été sec, les flots n’ont pu se rendre.

Pour commencer cette urgente opération, pour laquelle l’on dépensera de cinq à six cent mille livres, il faut, monsieur, autre chose que des assignats ; l’ouvrier a besoin, chaque jour, de son salaire pour avoir du pain depuis l’instant où l’on met la cognée dans le pied de l’arbre jusqu’à celui où il entre à Paris, dans les chantiers, il est passé dans les mains de dix ouvriers différents, de différents pays, qui tous ont des besoins journaliers. Comment voulez-vous que les marchands puissent subvenir a un achat d’argent aussi conséquent ? Cela est de toute impossibilité.